• My Way

Comment avez-vous trouvé votre compte en dehors de la médecine clinique, Madame Meier?

En tant que médecin-cheffe des institutions de santé de la ville de Zurich, Christiane Meier ne soigne pas des patientes ou des patients: elle veille à ce que certaines personnes ne tombent pas malades. Dans cet entretien, elle explique pourquoi elle ne regrette pas d’avoir quitté la médecine clinique – même si cette transition n’a pas été simple.

«Par sa personnalité affirmée, son style de leadership humain et équitable, et sa capacité à tirer le meilleur de chaque situation, Christiane Meier a été, pendant mon engagement auprès du service du médecin cantonal, un modèle pour moi en tant que femme et en tant que médecin. En qualité de médecin exerçant jusqu’ici en milieu hospitalier, cela m’a enrichie de voir qu’il existe aussi des voies épanouissantes en dehors de la médecine clinique.»

Marion Krüsi, médecin spécialiste et membre de la rédaction du Journal asmac

Christiane Meier, à quel moment de votre parcours médical avez-vous réalisé que vous préfériez la médecine préventive et la santé publique à la médecine clinique et thérapeutique?

Après mes études, j’ai entamé une carrière clinique classique avec l’objectif de devenir médecin de famille. Déjà en chirurgie, et encore davantage en gynécologie, mon intérêt pour la politique de la santé a grandi. Je me suis souvent demandé: comment pourrait-on organiser le système de santé de manière à ce que les gens deviennent un peu plus autonomes dans leur comportement en matière de santé? Un peu par hasard, j’ai entendu parler du Master of Public Health (MPH) et j’ai décroché un poste à l’actuel Institut d’épidémiologie, de biostatistique et de prévention, où je pouvais suivre le MPH en parallèle.

À partir de ce moment-là, était-il clair pour vous que vous ne retourneriez pas en clinique?

Non, à l’origine je considérais ce MPH comme une année sabbatique. À la fin de cette année, j’ai fait la liste des avantages, inconvénients, risques et opportunités – et j’ai réalisé que je voulais rester dans ce domaine et y faire mon titre de spécialiste.

Cette décision a-t-elle été difficile?

J’ai moi-même rapidement compris que c’était la bonne décision. Mais j’ai longtemps été tourmentée par l’idée que d’autres pourraient me considérer comme une «perdante», quelqu’un qui n’avait pas été assez forte et qui avait abandonné. Personne ne me l’a jamais dit, bien sûr, mais ce sentiment m’a accompagnée longtemps.

Comment vous en êtes-vous libérée?

Grâce à la conviction que mon travail est important et porteur de sens.

Personnalités inspirantes sous le feu des projecteurs

Précurseur courageux, cheffe empathique, formatrice charismatique, combattant politique: les caractéristiques et rôles qui peuvent servir de source d’inspiration aux jeunes médecins sont nombreux. Dans la série «My Way», nous donnons un aperçu des idées, expériences et parcours de personnes qui se distinguent par leur cheminement ou leur manière d’être.

Qu’est-ce qui vous fascine dans la médecine préventive et la santé publique?

Je suis passionnée par des questions comme: qu’est-ce qui maintient les gens en bonne santé? Que pouvons-nous faire pour qu’ils vivent dans des conditions leur permettant de rester en bonne santé? Et comment les motiver à changer un comportement malsain? La collaboration interdisciplinaire est également extrêmement enrichissante. Je travaille avec des personnes du domaine de la sécurité – police, protection civile –, mais aussi avec des acteurs du secteur environnemental, par exemple en matière d’aménagement urbain. Contrairement à la clinique, où l’on soigne des personnes malades, nous intervenons là où se forment les comportements en matière de santé.

Que conseilleriez-vous à de jeunes collègues hésitant entre médecine clinique et médecine préventive?

Il me semble important que les médecins acquièrent d’abord de l’expérience clinique. C’est la seule manière de comprendre ce que l’on quitte lorsqu’on se tourne vers la santé publique ou une autre spécialité non clinique. Il faut être conscient que le contact direct avec les patients y est largement absent. Il faut également faire preuve de persévérance, car la médecine préventive, par exemple, n’apporte des bénéfices que beaucoup plus tard; les résultats immédiats, comme dans la pratique clinique quotidienne, font généralement défaut. En revanche, concilier vie professionnelle et vie privée est souvent plus facile dans ce domaine. Et il n’est pas forcément nécessaire de choisir l’une ou l’autre voie: on peut aussi combiner les deux de manière intéressante.

Les deux domaines exigent une certaine résilience. Vous en avez fait la preuve en assumant la charge de médecin cantonale pendant la pandémie de coronavirus. Quel est votre «secret» pour rester sereine?

L’ouverture et la flexibilité sont essentielles: tout ne se passe pas toujours comme prévu, certaines choses relèvent du hasard et d’autres ne peuvent pas être directement influencées. Accepter cela ménage les nerfs et donne de l’énergie pour autre chose. J’essaie aussi, même en période de stress, de créer de petits îlots pour passer du temps avec des personnes qui me font du bien, sortir, ou pratiquer des activités que j’apprécie. Pendant la pandémie, j’ai appris davantage à déléguer – même si les choses ne sont alors pas faites exactement comme je les aurais faites. Et enfin, l’humour est extrêmement important: rire ensemble crée du lien et détend.

Biographie express

Après l’obtention du Master of Public Health et du titre de spécialiste en prévention et santé publique, Christiane Meier a travaillé notamment à l’Institut de médecine sociale et préventive (aujourd’hui Institut d’épidémiologie, de biostatistique et de prévention) de l’Université de Zurich, ainsi qu’à l’Institut de médecine sociale et préventive de l’Université de Bâle. À partir de 2007, elle a exercé diverses fonctions au sein du service médical cantonal de la direction de la santé publique de Zurich et, durant la pandémie de coronavirus, elle a occupé le poste de médecin cantonale. Depuis début 2025, elle est médecin-cheffe en santé publique auprès des institutions de santé de la ville de Zurich.